La Buy American Act : Comment les amendements affectent les entreprises canadiennes
Dans ce blog, nous examinons la Buy American Act, les modifications entrées en vigueur en 2022 et ses répercussions sur les entreprises canadiennes.
Les modifications apportées à la politique Buy American Act et une nouvelle administration ont une fois de plus relancé la conversation sur la capacité du Canada à exporter vers le marché du gouvernement américain et sur les répercussions de cette politique sur ses activités. Dans ce blog, nous examinons quelques informations de base sur la Buy American Act et la façon dont les entreprises canadiennes peuvent s’y retrouver.
Qu’est-ce que la Buy American Act?
La Buy American Act (BAA) (41 U.S.C. §§ 8301-8305), telle qu’elle est mise en œuvre dans la Federal Acquisition Regulation (FAR) Part 25, existe depuis les années 1930. Elle exige du gouvernement des É.-U. qu’il achète de préférence des biens et des services fabriqués aux États-Unis.
Cette politique s’applique à une gamme étendue d’achats d’un montant supérieur au seuil de micro-achat de 10 000 $ US effectués par les agences fédérales pour des projets de construction, des investissements dans les infrastructures et des biens et services.
En vertu de la FAR 25.003, pour les produits qui ne sont pas des produits de fer et d’acier, un produit est considéré comme un produit fini domestique si l’article est fabriqué aux États-Unis et si plus de 65 % du coût de toutes les pièces constitutives est également extrait, produit ou fabriqué aux États-Unis. La règle a été modifiée pour augmenter progressivement ce seuil jusqu’à 75 % en 2029, comme le montre la section ci-dessous.
Exigences de la Buy American Act (amendements de 2022)
Le département de la Défense, la General Services Administration (GSA) et la National Aeronautics and Space Administration ont publié une règle finale qui a considérablement changé les exigences en matière de préférence domestique dans la partie 25 de la Federal Acquisition Regulation (FAR). Ces modifications sont entrées en vigueur le 25 octobre 2022 et elles impactent les dispositions de la Buy American Act.
Augmentation des seuils
Avant le 25 octobre 2022, le coût des composants domestiques devait dépasser 55 pour cent du coût de tous les composants pour satisfaire au test des composants. La nouvelle règle a augmenté ce seuil de contenu domestique à 60 pour cent le 25 octobre 2022, 65 pour cent dans l’année civile 2024, et 75 pour cent dans l’année civile 2029.
Pour les contrats pluriannuels, le seuil de contenu domestique devra se conformer au seuil accru applicable pour les articles livrés chaque année. Par exemple, si le fournisseur obtient un contrat en février 2023, il doit se conformer aux 60 pour cent de contenu domestique pour les livrables avant l’année civile 2024. Cependant, pour les livrables entre 2024 et 2028, ils doivent fournir des produits avec 65 pour cent de contenu domestique.
Préférences de prix
Pour les offres de produits finis domestiques et de matériaux de construction soumis à la BAA, un facteur d’évaluation (préférence de prix) est appliqué. La préférence est de 50 % pour les approvisionnements effectués par le département de la Défense. Pour les approvisionnements effectués par des agences civiles, la préférence est de 30 % si l’offre est faite par une petite entreprise et de 20 % si l’offre est faite par une entité autre qu’une petite entreprise.
Les changements réglementaires qui prendront effet à une date future autoriseront les agences à appliquer une préférence de prix accrue aux produits finis domestiques et aux matériaux de construction considérés comme des articles critiques ou constitués de composants critiques.
Seuils d’exemption pour les achats du DoD des É.-U.
Actuellement, le gouvernement des États-Unis renonce aux exigences de la Buy American pour les accords bilatéraux de réciprocité en matière d’approvisionnement de matériel de défense de longue date du département de la Défense des États-Unis, tels que l’Accord sur le partage de la production de défense (APPD) entre le Canada et les États-Unis. Le DFARS 225.872-1, qui soutient la capacité du DoD des É.-U. à acheter des produits, des services et des solutions au Canada, stipule explicitement ce qui suit :
- À la suite de mémorandums d’entente et d’autres conventions internationales, le DoD a déterminé qu’il était incompatible avec l’intérêt public d’appliquer les restrictions de la Buy American statute to acquisitions en provenance de pays admissibles, le Canada étant l’un de ces pays.
Essentiellement, l’augmentation du seuil de contenu domestique n’a pas d’incidence sur les contrats du DoD des É.-U. avec les entreprises canadiennes, puisque celles-ci ne sont pas soumises aux réglementations de la Buy American Act.
Exemptions dues à l’Accord sur l’Organisation mondiale du commerce
Les exigences de la Buy American ne s’appliquent pas non plus au Canada pour les achats fédéraux américains couverts par l’Accord révisé de l’Organisation mondiale du commerce sur les marchés publics (AMP de l’OMC), auquel le Canada, les États-Unis et 46 autres pays sont parties. Les fournisseurs canadiens bénéficient du même traitement que les fournisseurs américains lorsqu’ils font des propositions pour des acquisitions fédérales américaines couvertes par ces conventions.
La Buy American Act fournit également des exceptions pour l’acquisition d’articles disponibles dans le commerce (COTS).
Autres exemptions
Des exonérations sont également accordées pour des raisons d’intérêt public ou si le coût des produits américains est déraisonnable par rapport à des produits étrangers équivalents (20 % de plus que l’importation habituelle ou 30 % de plus si l’offre est faite par une petite entreprise domestique; 50 % si l’acquisition est faite par le département de la Défense (DoD) pour les grandes et les petites entreprises). Elles peuvent également être accordées si les produits ne sont pas fabriqués aux É.-U. en quantités commerciales suffisantes et raisonnablement disponibles et de qualité satisfaisante.
Les autres exemptions de base incluent :
- s’il est dans « l’intérêt public » de s’approvisionner auprès d’un autre pays;
- si l’approvisionnement porte sur des équipements de technologies de l’information commerciales;
- si un produit domestique est destiné à être utilisé en dehors des États-Unis; ou
- si les biens achetés sont spécifiquement destinés à la revente dans les commissariats.
Seuil de repli
La réglementation finale inclut également une disposition de « seuil de repli » jusqu’en 2030, lorsque l’agence d’approvisionnement a déterminé qu’aucun produit fini ou matériau de construction ne répond au nouveau seuil de contenu domestique ou que de tels produits ne peuvent être obtenus qu’à un coût déraisonnable. Dans ce cas, le seuil initial de 55 pour cent de contenu domestique peut être utilisé.
Le seuil de repli ne s’applique qu’aux produits finis et aux matériaux de construction qui ne sont pas entièrement ou principalement composés de fer, d’acier ou d’une combinaison des deux et qui ne sont pas des articles COTS.
Pour les produits de fer et d’acier, le pourcentage applicable pour le coût des composants domestiques est de 95 pour cent. Le FAR fournit une norme similaire pour les matériaux de construction domestiques.
Test alternatif de contenu domestique
La réglementation finale autorise les responsables de l’approvisionnement à permettre l’application d’un test alternatif de contenu domestique afin de permettre à certains contractants du DoD des É.-U. de bénéficier du seuil applicable au moment de l’attribution du contrat pour toute la période d’exécution du contrat. Cette mesure est prévue dans les cas où il n’est pas possible pour un contractant du DoD de rencontrer le(s) seuil(s) de contenu changeant pendant toute la durée d’exécution du contrat.
Renforcement de la préférence de prix pour les produits et les composants critiques
La réglementation fournit un cadre dans lequel des préférences de prix plus élevées seront appliquées pour les produits finis et les matériaux de construction jugés critiques ou constitués de composants critiques. Ce qui veut dire que les produits fabriqués aux États-Unis auront une préférence encore plus grande par rapport aux produits étrangers dans ces secteurs.
La réglementation proposée prévoit qu’il incombe aux soumissionnaires d’indiquer que leurs produits finis domestiques contiennent un composant critique, de sorte que les agents contractuels puissent appliquer les préférences de prix plus élevées le cas échéant. Un règlement séparé permettra d’identifier et d’ajouter les produits et composants critiques au FAR et d’établir les préférences associées.
Ce que les amendements signifient pour les entreprises canadiennes
Ces amendements, en particulier la hausse des seuils, auront une incidence sur le nombre de contrats fédéraux américains pour lesquels les entreprises canadiennes peuvent faire des propositions, sauf lorsqu’elles vendent au DoD des É.-U. Ces modifications obligeront également les entreprises canadiennes à envisager de nouvelles ententes commerciales avec des partenaires américains afin de pouvoir participer aux opportunités d’approvisionnement du gouvernement fédéral américain.
Impact sur les entreprises canadiennes de défense et de sécurité
Comme mentionné plus haut, le Canada bénéficie d’une considération particulière pour les contrats liés explicitement à la défense et à la sécurité, compte tenu de la nature de la base industrielle de défense intégrée nord-américaine.
« La défense est sa circonstance unique à bien des égards », explique Darren Boomer, directeur des opérations de contrat à la CCC. « Le Canada fait partie de la base industrielle de défense intégrée nord-américaine, et le département de la Défense des É.-U. (DoD) a besoin d’avoir accès à des solutions canadiennes. »
Les exigences Buy American sont exclues pour les approvisionnements effectués par le DoD des É.-U. dans le cadre d’ententes telles que l’Accord sur le partage de la production de défense (APPD) entre le Canada et les É.-U. et au Defense Federal Acquisition Regulation (DFARS) 225.872-1.
Téléchargez notre guide pour savoir quelles sont les possibilités offertes aux entreprises canadiennes, où trouver ces possibilités et comment commencer à vendre au ministère américain de la Défense.
Atténuer les effets de la Buy American Act
Que peuvent donc faire les entreprises canadiennes pour atténuer l’impact des récentes modifications? Une solution consiste pour les entreprises canadiennes à se concentrer sur l’innovation et la différenciation. En développant des produits et des services innovants qui ne sont pas disponibles sur le marché américain, les entreprises canadiennes peuvent se créer une niche et éviter la concurrence directe avec les entreprises américaines.
D’autres options existent, notamment:
- Travailler avec des fonctionnaires canadiens pour exercer les exemptions prévues par l’OMC ou l’APPD;
- Devenir un sous-traitant d’une entreprise américaine;
- Mettre en place une entreprise commune;
- Établir une filiale aux États-Unis;
- Obtenir une dérogation;
- S’engager dans des projets qui n’utilisent pas de fonds fédéraux.
Travailler avec des fonctionnaires canadiens
Les entreprises canadiennes peuvent également travailler avec le gouvernement canadien pour exercer les exemptions et exceptions existantes à la Buy American Act. Le gouvernement canadien a toujours réussi à négocier la reconnaissance des exemptions pour les entreprises canadiennes, et cette option pourrait rester viable dans le futur.
Devenir un sous-traitant d’une entreprise américaine
Selon le Service des délégués commerciaux, les entreprises canadiennes ne peuvent légalement pas soumissionner directement pour des contrats réservés aux petites entreprises, aux entreprises minoritaires ou aux entreprises désavantagées. Toutefois, les fournisseurs canadiens peuvent participer à ce type de contrat de différentes manières. L’une d’entre elles est la sous-traitance.
Le contractant principal d’une petite entreprise peut consacrer jusqu’à 50 % de la valeur d’un contrat réservé à une petite entreprise à tout autre type d’entreprise.
Mettre en place une entreprise commune
Les fournisseurs canadiens peuvent décider de s’associer à des entreprises américaines en créant des coentreprises ou en devenant sous-traitants d’une entreprise américaine. L’une des options de coentreprise consiste à s’associer à une petite entreprise américaine qui donnera accès aux acquisitions fédérales américaines inférieures à 250 000 $US qui doivent être réservées aux petites entreprises américaines.
Une autre option de coentreprise est une coentreprise protégé-mentor avec une petite entreprise américaine pour soumissionner sur un contrat réservé. Comme indiqué dans un article de l’EDC, le mentor doit fournir une assistance technique ou financière au protégé, tandis que ce dernier doit être désigné comme gestionnaire de la coentreprise et effectuer au moins 40 pour cent du travail. La petite entreprise doit également détenir au moins 51 pour cent de la coentreprise.
Établir une filiale aux États-Unis
Les entreprises canadiennes peuvent se conformer aux règles « Buy America » en laissant leur société affiliée basée aux États-Unis faire le travail dans le cadre du contrat. Les entreprises canadiennes devraient obtenir une aide juridique et comptable professionnelle pour comprendre les options qui s’offrent à elles lorsqu’elles établissent une société affiliée.
Selon Christelle Shirandi, gestionnaire régionale associée pour l’EDC aux États-Unis, le fait d’avoir une société affiliée américaine offre d’importants crédits d’impôt à l’investissement et il est beaucoup plus facile de réaliser une fusion ou une acquisition si elle est effectuée par la société affiliée américaine d’une entreprise canadienne. Une société affiliée permet également à une entreprise canadienne d’être logistiquement plus proche des acheteurs et des projets américains.
Obtenir une dérogation
Les dérogations sont autorisées lorsque l’exigence « Buy America » pour un projet particulier serait incompatible avec l’intérêt public américain, que les matériaux requis ne sont pas produits aux États-Unis en quantités suffisantes et/ou en qualité satisfaisante et que l’utilisation des matériaux domestiques requis par rapport aux matériaux étrangers augmenterait le coût de l’ensemble du projet de plus de 25 pour cent.
Selon Michael Gonsalves, directeur du développement des affaires mondiales de l’EDC aux États-Unis, l’obtention d’une dérogation peut s’avérer ardue et complexe, et n’est pas conçue pour les projets à évolution rapide. L’obtention d’une dérogation est également un processus public et transparent qui exige des entreprises qu’elles divulguent ce qu’elles font et comment elles se positionnent pour obtenir la dérogation. La divulgation de ces détails peut constituer un désavantage concurrentiel.
Comment la CCC peut aider
Les entreprises canadiennes devraient demander des conseils juridiques pour comprendre comment la Buy American Act affectera leurs activités avec le gouvernement des É.-U.
En s’appuyant sur nos expériences et notre collaboration avec les partenaires du Gouvernement du Canada, nous pouvons également vous aider à naviguer dans les réglementations gouvernementales et vous mettre en relation avec des experts pour comprendre les marchés et les contrats d’approvisionnement du gouvernement.
Ce billet a été mis à jour le 16 janvier 2025.
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